Les chemins de la transition

Notre époque est secouée par une série de crises systémiques. Ces dernières ne sont pas insurmontables, mais leur enchaînement nous montre progressivement les limites de notre organisation sociétale aux niveaux économique, social et environnemental.

Pour ceux qui en doutent encore, je les encourage à regarder le magnifique article de Time magazine en partenariat avec Google, qui fait la part belle aux images de notre planète sur les 30 dernières années, intitulé sobrement « Timelapse » qui signifie en français « saut dans le temps ».

Nous l’avons déjà abordé ici, nous avons déjà l’ensemble des solutions qui nous permettent d’effectuer la transition vers un système politique, économique et social soutenable, voire durable. La transition écologique en somme…

Pourtant de nombreuses personnes continuent de voir uniquement les contraintes, et refusent de prendre en considération les changements de direction possibles et souhaitables! Pour répondre à ces nombreux déclinistes, il est temps de rassembler l’ensemble des initiatives positives émergentes.

Nous sommes en train de prendre conscience du verrouillage intellectuel de notre société à travers les doctrines dominantes concernant l’économie, la politique, les médias de masse, les idéologies nauséabondes…

enseigne CC

Il faut se méfier des voies miraculeuses évoquées par certains, qu’elles soient spirituelles, sociales ou technologistes, non pas qu’elles soient toutes mauvaises, mais simplement parcequ’elles ont tendances à occulter le fait que les solutions sont déjà là et qu’il n’est pas nécessaire pour réussir de chercher des voies de rupture. Si ces ruptures technologiques, sociales ou spirituelles ont lieu dans les années à venir, elles ne feront qu’accélérer les processus déjà en cours, à condition qu’ils aient été lancés avec dynamisme en attendant.

Comment faire la transition vers un système équilibré, non destructif, stable, sain, serein, joyeux?

Un certain nombre de scénarios, élaborés patiemment et indépendamment des pouvoirs politiques et économiques classiques, permettent d’entrevoir les chemins qui pourraient mener notre société vers une évolution positive, individuellement et collectivement.

Avant d’aborder ces scénarios, je vous encourage à regarder, et pourquoi pas à compléter, la cartographie heuristique ci-dessous. (envoyez moi un mail pour que je vous ajoute sur la carte en tant que collaborateur.)

Transformation, transition, évolution

Le premier élément à intégrer, c’est que nous avons suffisamment de ressources pour permettre à tout le monde de vivre décemment, y compris lorsque nous aurons atteint le pic de population mondial.

Nous serons au maximum 11 milliard d’humains sur terre selon les prévisions de l’ONU!

Les solutions existent et nous les avons déjà toutes! Elles ne sont pas supposées, ou rêvées, elles sont déjà efficaces et ne demandent qu’à être mises en oeuvre à grande échelle.

Après notre article concernant les solutions existantes, un peu en vrac, je me permets d’enchérir sur le sujet avec une liste de documents issus d’organismes indépendants et sérieux:

Ces Études Poussées Sur Le Sujet Nous Montrent Le Chemin:

Commençons par les conditions matérielles de la vie des humains, en premier lieu, il convient de concevoir les sytèmes agricoles permettant à tous de se nourir sans appauvrir les sols, ni polluer à l’extrême l’environnement, les nappes phréatiques, assécher les rivières…

Le scénario AFTERRE trace le chemin vers une agriculture très productive et très respectueuse de l’environnement, en appliquant certains principes de bon sens, et d’autres issus de l’agroécologie. Il ne s’agit pas d’un scénario dogmatique, puisqu’il ne s’interdit pas de manière absolue l’utilisation d’engrais ou de pesticides, mais il envisage de manière crédible une utilisation multiples des sols permettant de maximiser les rendements en équilibrant les cultures.

Un exemple de l’utilisation des sols dans le scénario AFTERRE:

Exemple de l'utilisation des sols dans le scénario AFTERRE

 

L’évolution de la consommation de produit alimentaire, vers moins de produits carnés et une augmentation des protéines végétales:

Composition de la ration alimentaire dans le scénarion  AFTERRE

 

Une fois que la question de la nourriture est réglée, il faut s’attacher aux ressources énergétiques:

C’est là que le scénario Negawatt entre en jeu. Partant des éléments actuels et des technologies en fonction actuellement, ce scénarios trace une voie de transition énergétique et écologique à l’horizon 2050:

 

 

La démarche Négawatt

 

Schéma simplifié 2010

 

 

Schéma simplifié 2050

 

Il est intéressant de voir que ces deux premiers scénarios sont actuellement en train d’évaluer leurs convergences. Peut-être assisterons-nous à une fusion des deux scénarios à terme, vers une démarche prospective globale de notre système.

Afterres2050 Et NégaWatt 2011 : Les Convergences

Le scénario négaWatt 2011 et le scénario Afterres2050 de Solagro reposent sur des fondamentaux similaires – partir des besoins, appliquer la sobriété, l’efficacité, le recyclage ou la valorisation des ressources renouvelables, …

Parmi les points d’interface :

  • Afterres2050 fournit à négaWatt la quantité de biomasse mobilisée pour l’énergie. Bois, biogaz, carburants, représentent 40% de l’énergie finale en 2050. Le principal carburant utilisé en 2050 sera le méthane, issu de biogaz et de bois via la gazéification puis la méthanation ;
  • Le scénario Afterres 2050 complète négaWatt en matière d’agriculture et de forêt : il traite la majorité des gaz à effet de serre hors CO2 énergie (méthane et protoxyde d’azote d’origine agricole) et des puits de carbone (forêts et sols agricoles).
  • Les besoins en matériaux (bois de construction, papier, paille…) sont définis à partir du programme RENOV de négaWatt, (construction et rénovation des bâtiments),
  • Inversement la production d’engrais azotés et la consommation d’énergie de l’agriculture issue d’Afterres2050 est versée aux « tableurs et scénario » négaWatt.

Au final, un beau travail de collaboration, qui se poursuit.

Maintenant que nous avons vu que les conditions purement matérielles pouvaient être satisfaites pour tout le monde, il faut compléter le tableau avec les transformations de notre système économique et social.

On assiste à l’émergence d’un certain  nombre de pratiques permettant aux individus de minimiser leur dépenses tout en ayant accès à des biens ou des services de haute qualité. Il s’agit de la vague de la consommation collaborative qui permet d’envisager la richesse et la propriété sous un angle légèrement différent permettant à chacun à travers la redécouverte de la richesse collective et de l’échange social, de bénéficier de bien plus de choses que si l’on reste un « agent économique » solitaire. Cela nous amène naturellement vers l’économie du partage, popularisée par le mouvement du logiciel libre notamment, si tu copies un logiciel libre tu t’enrichis de ce logiciel et grâce à ce logiciel, tu n’as privé personne de son utilisation, tu n’as pas appauvri son propriétaire, car nous en sommes propriétaire collectivement, le logiciel a éventuellement des auteurs, mais cela s’arrête là…

Conso collaborative

Ces même principes sont applicables à l’ensemble des idées, il n’est plus nécessaire de breveter des idées, mais d’organiser les modalités de leur réalisation, plus les idées sont partagées, plus il est facile de connecter les opérateurs économiques entre eux afin de dynamiser la réalisation…

L’économie circulaire propose de transformer les déchets en matière première réutilisée pour la conception des produits ou pour d’autres utilisations. En d’autres termes, ne plus créer de résidus que les systèmes industriel et naturel ne puissent absorber. La boucle est bouclée. Cela représente bien entendu un gain de compétitivité énorme pour les industries qui ont une maîtrise de leur flux de matières premières.

Economie circulaire

Il faut rapprocher le concept d’économie circulaire de celui d’écologie industrielle.

 

Dans les stratégies économiques et sociales en rupture radicale avec le climat de pensée actuel, un concept fort est en voie de concrétisation à travers le lancement d’une initiative citoyenne européenne et d’une initiative fédérale en Suisse.

Logo des ICE

Ce concept, c’est celui du revenu de base, qui porte différents noms selon les penseurs qui l’évoquent. La définition choisie par le mouvement français pour le revenu de base est la suivante:

Le revenu de base est un droit inaliénable, inconditionnel, cumulable avec d’autres revenus, distribué par une communauté politique à tous ses membres, de la naissance à la mort, sur base individuelle, sans contrôle des ressources ni exigence de contrepartie, dont le montant et le financement sont ajustés démocratiquement.

Logo mouvement pour un revenu de base

Les impacts en terme sociétaux sont immenses. La notion même de travail en est bouleversée. Il n’est plus nécessaire d’accepter n’importe quel travail pour vivre. La négociation entre employeurs et employés est rééquilibrée, les emplois pénibles sont revalorisés. La misère économique disparaît. L’instauration d’un revenu de base aurait pour effet de libérer l’innovation et la créativité et donc la création de valeur économique et sociale.

Dans un monde où le travail disparaît alors que la richesse totale ne cesse d’augmenter, la solution paraît évidente: il faut partager la richesse!

Bannière revenu de base en français

 

Les deux derniers éléments que j’évoquerai dans cet article sont plus généraux.

Le concept d’éducation populaire n’est pas nouveau, il vise à donner, en dehors du circuit scolaire ou institutionnel, un accès aux savoir et à la culture, pour l’ensemble des individus, quelle que soit son extraction sociale.

Cette éducation, plus libre, capable de s’affranchir du carcan institutionnel et de ses limites, est l’une des conditions indispensables de l’évolution de notre société. L’école tend malheureusement à reproduire les distinctions sociales, sélectionne une élite, et lui donne les clés pour gouverner. L’éducation populaire vise quand à elle à donner à tous, sous la forme qui lui convient le mieux, les clés de sa propre réussite, de l’accomplissement de ses projets. Elle questionne également les bases sociales et civiques qui fondent notre société.

Si vous souhaitez approfondir, la SCOP Le Pavé détaille très bien ces concepts dans ses conférences gesticulées.

Je voudrai également évoquer une démarche très intéressante qui se décline sur 3 axes:

  • celui des comportements individuels,
  • celui du mode de fonctionnement des organisations,
  • celui des politiques et des institutions.

Il s’agit du Pacte civique, qui, à travers 32 engagements relativement simples, trace la voie vers une société équilibrée et solidaire. Ces engagements concernent les individus eux-même et leurs modes de fonctionnements collectifs au sein des organisations.

 

logo_pactecivique

 

L’apparition de nouvelles formes de gouvernance, et la volonté de transformer nos vieux schémas démocratiques. Qu’il s’agisse de pousser à la transparence de nos élus, ou d’obtenir facilement les informations dont dispose l’Etat, nous assistons à une transformation progressive de la conception de gouvernement.

 

La démocratie ouverte

 

Des projets émergent, en ayant pour objectif de rendre la place aux citoyens dans le débat démocratique:

Parlement et citoyens, innove et propose aux parlementaires de co-construire la loi avec les citoyens.

Démocratie Durable permet aux citoyens de proposer des projets et fournit une base de projets aux élus, locaux comme nationaux.

Des développeurs sont en train de concevoir des logiciels libres permettant de faire de la démocratie directe à l’échelle d’un pays.

D’autres sont en train de fabriquer les logiciels permettant de s’affranchir des contraintes techniques permettant de brider le réseau Internet

En conclusion, bien que cet article ne vise pas à l’exhaustivité, lorsque l’on se retrouve face à la morosité ambiante, il faut promouvoir les idées positives déjà présentes et en cours de mise en oeuvre. Ces engagements positifs sont, j’en suis convaincu, le terreau fertile du monde de demain.

Quelques “Prezi” autour de la Sociocratie et introduction à l’Holacracy

sociocratie 5

Pour bien commencer l’année, je vous propose une série de Prezi et une carte heuristque autour de la “Sociocratie” et du management des organisations.

Prezi est un outil de présentations en ligne que j’utilise occasionnellement dans sa version en ligne gratuite, les cartes heuristiques ou mind-maps sont une manière d’organiser l’information, de la structurer afin de la rendre interactive et accessible rapidement.

En préambule, je vous offre La définition de wikipédia: La sociocratie est un mode de prise de décision et de gouvernance qui permet à une organisation, quelle que soit sa taille — d’une famille à un pays —, de se comporter comme un organisme vivant, de s’auto-organiser. Son fondement moderne est issu des théories systémiques. L’objectif premier est de développer la co-responsabilisation des acteurs et de mettre le pouvoir de l’intelligence collective au service du succès de l’organisation.

 

Pour démarrer en douceur, un premier Prezi en images, rapide et facile à comprendre:

 

Poursuivons avec une carte heuristique qui rassemble l’essentiel des concepts et des ressources autour de la Sociocratie:

 

Le Prezi suivant est en anglais, il pose les bases des concepts qui président une organisation dite “agile” et il énonce quelques principes fondamentaux de la Sociocratie appliquée aux organisations:

Elegant Leadership: The Sociocratic Way to a Graceful Organisation:

 

Le Prezi suivant est également en Anglais, il pointe les avantages et les travers des différents modes de management existants, et il reprend les règles de bases de la Sociocratie:

 

Je pense que ces ressources vous seront utiles, si comme moi vous aspirez à des changements profonds dans les méthodes de gouvernance de nos organisations, des plus petites aux plus grandes. Ces méthodes permettent d’accroître l’efficacité des processus d’une organisation mais également le bien-être des participants qui se trouvent associés aux processus décisionnels qui les concernent au lieu de rester dans un rôle d’exécutant comme c’est aujourd’hui trop souvent le cas dans nos organisation.

De nombreux sites francophone et anglophones traitent de la question, proposent des introductions vidéos et des formations, vous remarquerez la différence d’orthographe entre le français et l’anglais:

http://www.sociocratie.net/index.php

http://www.sociocratie-france.fr/

https://sites.google.com/site/sociocracybelgium/

http://www.sociocracy.info/

http://www.sociocracy.biz/

 

Il existe un autre système qui présente de prime abord des similarités avec la Sociocratie, il s’agit de L’Holacratie :

Je me permet de vous livrer un document ressource sur le sujet qui vous permettra de démarrer très rapidement avec cette méthode de gouvernance innovante et agile!

Vous pouvez aussi regarder la vidéo de présentation de la méthode chez IGI Partners.

 

Je vous livre ici un extrait de ce qu’en dit Kevin Dalton de chez Lowanka, qui a eu la gentillesse à travers les commentaires d’apporter les rectifications nécessaires à cet article:
La sociocratie et l’Holacracy sont 2 outils que nous connaissons bien au sein de LowanKa pour les avoir pratiqué au sein de notre organisation. La sociocratie est une méthode de gouvernance et l’Holacracy est une autre méthode de gouvernance bien distincte. Il y a de très grosses différences dans ces 2 outils.
J’ai aujourd’hui un peu plus d’1 an d’expérience d’Holacracy dans les jambes et suffisamment de recul pour vous préciser que l’Holacracy va beaucoup plus loin que la Sociocratie et qu’à la rigueur le seul aspect de la Sociocratie que l’on retrouve en Holacracy, c’est le principe du double lien.. Aspect que l’Holacracy a poussé encore plus loin en apportant des subtilités.
L’Holacracy est une pratique qui a émergé au sein d’une entreprise américaine qui a utilisé pendant 7 ans bon nombres d’outils et d’inspiration pratique pour développer un nouveau concept de Gouvernance. Une société a émergé et elle s’appelle aujourd’hui Holacracyone. Elle fait la promotion du produit « Holacracy », qui au passage n’a rien de « pyramidale »… bien au contraire !

 

 

 

 

La représentativité et le pouvoir


Les “démocraties” en pannes
:

 

Nos démocraties représentatives souffrent actuellement d’un mal profond, puisque le socle même sur lequel elles reposent vacille. La représentation qui était sensée assurer le fonctionnement démocratique se retrouve mise en défaut par plusieurs facteurs :

– Le premier de ces facteurs est connu depuis de nombreuses décennies, mis en lumière avec brio par Bourdieu, il s’agit du concept de reproduction sociale. Les élites tendent à conserver leur place au sommet de la hiérarchie économique et politique, et la perméabilité entre les différents milieux sociaux est presque une illusion (les exceptions n’étant là que pour confirmer la règle).

– La légitimité de nos représentants obtenue par le vote est également remise en question, puisque les votes nuls et blancs ne sont pas pris en compte dans les résultats, et les pourcentages de résultats sont énoncés hors abstentions. La pratique de l’élection représentative ne trompe aujourd’hui plus personne, mais elle est toujours envisagée comme la seule solution possible. Nous avons montré par ailleurs que ce n’était plus le cas aujourd’hui.

– Le dernier facteur, et non des moindres, c’est que la concentration du pouvoir entraîne inévitablement l’abus. Nous avons l’habitude depuis Locke et Montesquieu de pallier cet inconvénient majeur en instaurant une séparation des pouvoirs. Cette séparation permet de contre-balancer les abus de chacun des pouvoirs par un autre pouvoir. D’où la construction de nos sociétés occidentales autour de trois pouvoirs: législatif, exécutif et judiciaire. Depuis Montesquieu on a ajouté le pouvoir de l’opinion, qui est en réalité surtout celui de la presse et des sondages.


Le quatrième pouvoir
:

 

Attardons-nous quelques instants sur le quatrième pouvoir, celui de la presse. Ce pouvoir qui au début s’exprimait grâce au papier et à l’imprimerie s’est transformé plusieurs fois au cours du 20ème siècle. Trois révolutions technologiques majeures sont venues bouleverser la manière dont les informations sont transmises et sont reçues. La presse écrite n’a pas disparu, mais son influence s’est réduite aux élites instruites, qui ont le temps et la patience de lire les informations qu’ils choisissent. Pour les autres, la radio puis la télévision sont venus limiter leur choix à la fréquence ou la chaîne qu’ils écoutent. Il est même prouvé que le cerveau fonctionne différemment lorsque l’on lit un texte, lorsque l’on regarde la télévision ou que l’on écoute la radio. Les techniques de manipulation sont connues et bien étudiées, malheureusement peu de gens parviennent à démêler l’écheveau de conditionnement que l’on tisse autour d’eux chaque jour. Sartre disait que nous sommes prisonniers de nos conditionnements et déterminismes. Le seul moyen alors de devenir libre est d’apprendre à connaître ses déterminismes afin de pouvoir les surmonter. C’est un travail qui exige un regard critique sur soi-même, une remise en question constante de ses opinions, et une confrontation permanente avec des points de vue opposés afin de ne pas s’ankyloser dans ses propres convictions. Pour compléter le panorama, un très bon dossier d’InternetActu sur le fonctionnement du cerveau se trouve à l’adresse suivante.

A propos de la manipulation médiatique des masses, l’émergence d’Internet a montré son potentiel en terme de fédération hors du contrôle opéré par les médias classiques. Les attaques contre la liberté d’Internet, depuis quelques années, dont l’objectif est de contrôler les informations circulant sur les réseaux, témoignent de la crispation des différents pouvoirs (économiques, politiques et médiatiques) face à un outil qu’ils ne peuvent maîtriser et qui reste jusqu’à présent le seul élément fédérateur des peuples. La mondialisation économique avant l’émergence d’Internet avait pour conséquence la confiscation de la liberté des peuples à décider de leur avenir.


Démocratie Directe :

 

Dans l’optique d’une démocratie directe, déjà évoquée, il convient de résoudre deux problèmes :

– La non-concentration des pouvoirs

– La représentativité du législateur et de l’exécutif

 La non-concentration des pouvoirs dans une démocratie directe, où l’ensemble des citoyens ont la possibilité, non seulement de voter les lois, mais également de les travailler, est le premier pas vers une répartition du pouvoir législatif à travers l’ensemble de la population.  J’ai détaillé les outils à mettre en œuvre pour accompagner cela. Il reste toutefois deux éléments à expliciter:

– Comment garantir la représentativité du “législateur” lorsqu’il est composé de centaines de milliers, voire de millions de personnes?

– Comment désigner un “exécutif” en limitant ses possibilités d’abus de pouvoir?


Représentativité
:

 

Lorsque l’on permet à plusieurs millions de personnes d’écrire eux-même les lois qui vont les régir, nous n’obtenons jamais que toutes ses personnes se mobilisent pour participer effectivement au processus législatif. Toutefois, plusieurs centaines de milliers de personnes peuvent se mobiliser afin de discuter d’une loi, d’en écrire le contenu et d’en soumettre le vote final à l’ensemble des citoyens. Il convient alors de pondérer le vote de chacun des participants volontaires à la rédaction du texte, afin de garantir une représentativité de ce panel de volontaires par rapport à l’ensemble de la population. Cela permet d’établir de manière symbolique que l’ensemble des lois émaneront de l’ensemble du corps législatif. Pour cela, nous devons définir des critères permettant de caractériser les participants; qui reprendraient, par exemple, un certain nombre de caractéristiques évidentes: âge, sexe, zone géographique, métier, niveau d’étude, opinion politique, etc..

Évidemment, il est important de choisir attentivement ces critères afin qu’ils permettent de définir correctement l’ensemble de la population, et il faut mesurer précisément l’évolution de ces caractéristiques au sein de la population au cours du temps. Chaque personne se définit par l’ensemble de ses critères, et verra son vote pondéré par son degré de représentativité au sein de la population. Concrètement, un votant ne pourrait se retrouver avec plus de 2 voix, à moins que le nombre de participants soit très faible, et que cette personne fasse partie d’une extrême minorité. Avec un échantillon de la population de l’ordre de 50 000 à 100 000 personnes, les biais statistiques, et les marges d’erreurs sont considérablement réduites.

L’objectif de cette pondération est de donner à chacun un pouvoir de décision qui n’excède jamais son degré de représentativité dans une population donnée. Ainsi, une “oligarchie” éduquée qui voudrait faire passer une décision n’aurait d’autre choix que d’en démontrer à l’ensemble le bien fondé et l’intérêt général. Elle ne pourrait s’arroger le pouvoir sous couvert de compétence.


Intelligence Collective :

 

On peut mettre en balance cette proposition de pondération avec la règle habituellement admise en démocratie: “un homme = une voix”. Ce principe, qui à l’origine permettait d’éviter la mise en place d’une oligarchie, se trouve mis en défaut dans le cas où l’ensemble des citoyens sont appelés à participer en permanence à la création législative et réglementaire. En effet, les citoyens les plus disponibles, sont ceux ayant le moins d’activités : sans emploi, retraités, étudiants, … Ils ne sont donc pas forcément représentatifs de l’ensemble : dès lors la catégorie des actifs, moins disponible bénéficierait d’une pondération favorable permettant de rééquilibrer son poids face aux autres catégories.

Ce système n’est peut-être qu’une complexification inutile visant à garantir l’égalité individuelle mais aussi celle de catégories particulières au sein de la société. A la lumière des théories de l’intelligence collective, on constate que le simple fait de mettre en place des cadres de décision permettant à tous d’apporter leur pierre à l’édifice, permet la création de décision bien meilleures que lorsqu’un petit groupe de décisionnaires s’arroge la capacité de décider pour un ensemble. Sans nécessairement obtenir un consensus total sur chaque décision, en utilisant les techniques de l’intelligence collective, on obtient rapidement des décisions satisfaisantes pour un ensemble d’individus et de groupes d’individus.


Sécurité :

 

Se pose également la question de la sécurité des processus, aussi vrai pour des prises de décision utilisant les outils informatiques dématérialisés que pour les processus réels actuels. Il est possible de bourrer une urne réelle, et de la même manière, d’infiltrer tous les systèmes informatiques . On peut dès lors respecter le même principe que pour les élections réelles, on établit des méthodes d’observation et de contrôle, de sorte que si la fraude peut se produire, elle soit toujours détectée. Les logiciels servant de support aux processus doivent être transparent et open-source ce qui garantit un niveau de sécurité bien plus élevé qu’une boite noire à laquelle peu de gens ont accès. Les urnes sont transparentes en France, ce qui n’est pas le cas en Russie par exemple. Les machines à voter américaines ont été détournées de leur fonction à plusieurs reprises. Il convient donc d’apporter un soin extrême aux méthodes que l’on met en place, aux processus et à leur contrôle… Peu importe qu’ils soient réels ou virtuels, il faut toujours veiller à empêcher le détournement du système.


L’exécutif :

 

Reste la question de l’exécutif, car même lorsque les lois sont bonnes, leur application est fondamentale, et l’on constate que les meilleures lois peuvent êtres vidées de leur sens et de leur efficacité par un manque délibéré d’application. L’exemple français de l’application du Grenelle de l’environnement est une illustration flagrante de ce genre de défaut de l’exécutif. Comment garantir alors qu’un exécutif applique effectivement les décisions prises démocratiquement par l’ensemble des citoyens?

On peut s’intéresser un moment à l’idée du tirage au sort, qui est très ancienne, puisqu’elle était déjà appliquée à Athènes dans l’antiquité. L’argumentation d’Étienne Chouard sur le sujet est assez éclairante:

 

Etienne Chouard et la démocratie

 

Source: Plan C

Je le rejoins sur l’idée que le tirage au sort à pour avantage de garantir de manière absolue la non-appropriation du pouvoir par l’élite. Toutefois, je souligne que ce tirage au sort régulier, selon moi, ne devrait s’appliquer qu’aux fonctions exécutives, judiciaires, et toutes les fonctions de surveillance et de contrôle: cour des comptes, comités de surveillances, autorités administratives indépendantes

Le pouvoir constituant et les fonctions législatives étant appliqués par l’ensemble de la population comme évoqué plus haut.

En complément, la conception des fonctions changent, puisqu’on ne place plus une personne pour assurer une fonction, mais un collège de personnes! Ce qui a pour effet d’empêcher la dérive d’un individu par rapport à une fonction, et l’abus de pouvoir.

On peut donc conclure partiellement le sujet en constatant que les freins actuels à l’instauration de véritables démocraties à travers le monde ne sont pas techniques ou scientifiques. Nous avons d’ors et déjà les moyens techniques et intellectuels de mettre en place la démocratie directe à l’échelle d’un pays comme la France. Le véritable frein réside donc dans nos esprits. Il faut prendre conscience de l’illusion démocratique que l’on nous impose et faire un pas supplémentaire pour comprendre que nous pouvons dès aujourd’hui instaurer un véritable système démocratique. Il faut garder à l’esprit qu’aucun système n’est parfait, mais on se rend compte que certains systèmes respectent mieux l’intérêt général que d’autres!

Toute cette réflexion rejoins les démarches d’open-gouvernance, qui prône une ouverture plus importante aux citoyens des différents processus conduisant à la production de droits. Pour résumer simplement ce concept, je vous propose la petite infographie suivante:

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Les mouvements citoyens mondiaux


Les mouvements sociaux à l’échelle globale se multiplient, je ne parle pas du printemps Arabe, largement traité partout ailleurs depuis 6 mois, je parle de mouvements plus silencieux et qui ne touchent pas l’ensemble des citoyens d’un même pays, mais qui touchent l’ensemble des pays du monde et qui sont forts de plusieurs millions de membres actifs, et qui ne connaissent pas non plus la même attention médiatique:

 


– le premier que je voudrai citer, c’est le mouvement AVAAZ, qui grossit et qui gagne en puissance en se dotant de moyens originaux et ne faisant appel pour son financement qu’à ses membres:

http://www.avaaz.org/fr/

Le mouvement revendique un peu plus de 10 Millions de membres à travers le monde. Leur action à commencé avec la signature de pétitions sur internet, aujourd’hui, même si les pétitions fédèrent la plus grande partie de ses membres, AVAAZ lève des fonds auprès de ses membres sur les différentes campagnes qu’il mène. Certains modes d’action peuvent être originaux, comme d’envoyer des téléphones satellites en Lybie pour aider les rebelles à communiquer, faire pression médiatiquement en lançant de vastes campagnes de presse afin de faire plier les dirigeants face à l’opinion publique , etc… (les modes d’action non-violents étant traités par ailleurs dans un autre forum de ce site, je ne m’étendrait pas à ce sujet ici.) Je vous laisse découvrir leurs campagnes sur leur site Internet.


Le second mouvement dont je voudrai vous parler est le mouvement Zeitgeist, il est plus difficile de comptabiliser ses membres, l’organisation étant décentralisée dans ce mouvement, il s’agit d’un mouvement spontané apparu en réaction aux trois films diffusés librement sur internet dont les titres sont: « ZeitGeist », “Zeitgeist Addendum”, et “Zeitgeist: Moving Forward”. Un quatrième film est en préparation sous le nom: “Zeitgeist: Beyond the Pale”. “Zeitgeist” signifie littéralement en allemand: « l’esprit du temps », je ne vous ferai pas une critique cinématographique ici, je laisse donc chacun apprécier les œuvres à leur manière,  le troisième film a été visionné plus de 12Millions de fois sur YouTube, sans compter les projections publiques dans les cafés, les bars, les salle des fêtes, les places de village, … :

http://presentation.mouvement-zeitgeist.fr/films.html

Certains y verront la marque de la théorie du complot, ce qui n’est pas tout à fait faux, mais il convient d’analyser l’émergence du mouvement avec un peu plus de nuances qu’un jugement à l’emporte pièce!
D’autant qu’il semble que le mouvement des indignés américains ait plus de filiation avec le mouvement ZeitGeist qu’avec Stéphane Hessel (que j’apprécie également pour d’autres raisons, mais ce n’est pas le sujet ici…)
Je vous laisse découvrir l’esprit du mouvement sur la page de présentation francophone:

http://presentation.mouvement-zeitgeist.fr/

L’organisation du mouvement est à l’image des idées avancées, il n’existe aucune hiérarchie de personnes, personnes ne prend de décisions pour les autres, chacun est libre de s’investir ou non et aux tâches qu’il souhaite effectuer. Démocratique et basé uniquement sur le volontariat. L’organisation est cohérente et efficace, il n’y a que deux échelons entre le groupe local et la coordination nationale.

Le mouvement se concentre actuellement sur des actions de sensibilisation, mais il existe d’ors et déjà des projets de mise en place de l’économie basée sur les ressources, qui est la pierre angulaire d’action et de conviction des membres du mouvement.

 

Un mouvement plutôt francophone, mais déjà international mérite également sa place ici, il s’agit du mouvement Colibris!

Ici, il s’agit de fédérer des citoyens autour de dynamiques locales. A travers le processus de forum ouvert par exemple. Cela permet aux citoyens de se rencontrer et de co-construire des projets communs, de trouver les ressources pour réaliser des projets qui parfois ont longtemps mûrit sans jamais voir le jour faute de pouvoir partager avec d’autres cette volonté d’agir.

Le mouvement Colibri puise son origine dans l’association de Pierre Rabhi “Terre et Humanisme“, qui promeut et diffuse l'”Agro-écologie” en France et au Sahel. Pierre Rabhi est le défenseur d’une vision simple du développement durable qui se rapproche de la décroissance avec la notion de “sobriété heureuse”!

 

Les trois mouvements cités plus haut sont parfaitement légaux, respectent les lois en vigueur et utilisent des moyens d’action non-violent.


Je voudrai donc citer maintenant un troisième mouvement, qui lui s’éloigne de la légalité et qui utilise la violence virtuelle comme moyen d’action:

Je veux bien entendu parler du mouvement Anonymous et de la sphère qui gravite autour. Ce mouvement est également un mouvement spontané, né d’Internet et des réseaux sociaux, il milite notamment pour la liberté des réseaux, la liberté d’expression réelle et virtuelle:

http://fr.wikipedia.org/wiki/Anonymous_(communauté)

Le mode d’action principal est celui, maintenant bien connue médiatiquement, du déni de service, qui consiste à se connecter à un serveur de nombreuses fois et avec un grand nombre de machines. Le serveur ne pouvant répondre aux demandes, le site devient inaccessible le temps de l’attaque. C’est d’une simplicité enfantine, (d’ailleurs certains Anonymous ont moins de 15ans) et cela peut coûter cher à une entreprise qui n’est pas préparée. De plus, certains virus permettent de coordonner des attaques depuis d’autres machines, votre ordinateur à peut-être déjà participé à ce genre d’attaque sans même que vous en ayez conscience! D’où la difficulté de retrouver les auteurs.

Pour les attaques informatiques plus complexes il est probable qu’elle soient l’œuvre d’autres groupuscules plus organisés et bénéficiant de plus de ressources techniques.

En guise de résumé, on observe l’émergence d’une conscience et d’une organisation citoyenne à l’échelle mondiale sous différentes formes. Ces organisations ont des objectifs bien définit et elles remportent un grand nombre de succès depuis quelques années. Je n’ai pas parlé de Wikileaks ici, car le sujet à été traité des milliers de fois par ailleurs. Je voulais simplement élargir un peu le panorama des mouvement citoyens mondiaux qui sont loin d’être anecdotiques, qui sont porteurs de valeurs communes à l’échelle globale et qui agissent déjà pour transformer le monde.

 

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La gouvernance démocratique

Le mot démocratie est aujourd’hui communément employé pour désigner les démocraties représentatives occidentales, qu’il s’agisse de monarchies parlementaires, de républiques fédérales ou encore d’États centraux.

Hormis quelques rares exceptions, l’ensemble de ces « démocraties » sont des systèmes représentatifs où les citoyens élisent des représentants chargés de mettre en œuvre le pouvoir législatif et le pouvoir exécutif. La plupart du temps, la justice est exercée par des professionnels indépendants des deux autres pouvoirs.

Dans quelques rares situations, on permet aux citoyens d’exercer directement les trois pouvoirs: élections, référendums et jurys populaire.

Cette description est bien entendue schématique, chaque état ayant ses spécificités et ses modes de fonctionnement propres. Il est difficile de comparer les États-Unis (État fédéral) et l’Allemagne (également un État fédéral). Ici je ne rentrerai pas dans le détail de chacune des « démocraties » que nous connaissons, je laisse cela aux spécialistes de chaque domaine.

Le point que je voudrai aborder est plus large que la vision démocratique occidentale actuelle. L’idée de « gouvernance démocratique » peut revêtir un grand nombre de formes et de modes de fonctionnement.

On assiste depuis quelques années à l’émergence d’une nouvelle conscience citoyenne, plus globale, plus internationale, et moins idéologique. Les grands mouvements syndicaux, politiques et religieux se sont essoufflés à travers le monde occidental. La conscience des jeunes générations et leur vision du monde se sont développées en même temps que l’essor d’Internet: la prise de conscience environnementale fut accompagnée par un accroissement du volume d’information et la naissance du « village mondial ».

Plus que jamais à travers l’histoire, les habitants de notre planète se sentent plus proches et plus reliés avec l’ensemble des autres États et de leurs citoyens. Le meilleur exemple est celui du mouvement AVAAZ, et de son réseau de près de 10 millions de membres, qui influencent les décisions politiques à travers le monde.

Les campagnes électorales évoluent également pour prendre en compte la dimension citoyenne (plus large que la dimension partisane) et Internet. Nous avons l’exemple de 2007 et du concept de « démocratie participative », je pense également la campagne de Barack Obama en 2008, et aux tentatives avortées de création de réseaux sociaux politiques en France.

L’évolution des modes d’information, la critique des médias classiques et de leurs connivences avec la sphère politique, et l’émergence de nouvelles sphères d’actions et d’interactions sont en train de transformer la manière dont se forge l’opinion publique et rendent le citoyen acteur de ses propres choix, qu’ils soient politiques, informationnels ou décisionnels.

Sur ce dernier point, la création de nouvelles méthodes de production décisionnelle est encore embryonnaire. Les outils techniques et les méthodes existent, mais ceux-ci sont encore sous-utilisés, et ce quelle que soit le domaine. En entreprise, l’émergence de l’innovation participative ne s’accompagne que rarement d’une évolution des processus de décision. Dans la sphère politique, les réunions publiques, les conseils de quartier, les réunions citoyennes pour l’élaboration des agendas 21, se limitent souvent à une audience extrêmement faible, et bénéficient d’un pouvoir essentiellement consultatif.

Il convient donc de recenser les outils et les méthodes existants afin d’en extraire les axes structurants, d’analyser les processus de production des décisions, qu’elle soient politiques, sociales ou économiques. Ces recherches permettront de dégager les fondements des modes de gouvernance de demain.

L’objectif étant d’obtenir des décisions meilleures, auxquelles les citoyens dans leur ensemble peuvent participer activement et de manière éclairée. C’est le sens de l’évolution démocratique. Nous avons les moyens techniques et les connaissances pour aller au delà du système représentatif. Ce dernier fait déjà figure d’archaïsme au regard des moyens dont nous disposons aujourd’hui et du niveau de culture, d’éducation et d’information de la population. Le seul obstacle qui subsiste est moral. Il faut démontrer, tester et valider de nouveaux outils décisionnels associant le citoyen, les experts et les acteurs économiques et sociaux, permettant d’élaborer des lois, des réglementations, des orientations économiques, des projets sociétaux…

Dès lors la voie sera grande ouverte vers une réelle démocratie, ou chaque citoyen est acteur des choix de la société dans laquelle il évolue.

Les outils de la gouvernance démocratique

Une gouvernance réellement démocratique implique de dépasser les modes de fonctionnement en vigueur actuellement dans la prise de décision.

Aujourd’hui, on considère que la prise de décision politique ou économique est le privilège d’un cercle restreint éclairé par ses études, ses titres ou ses fonctions. Qu’il s’agisse de décisions prises au sein des entreprises, associations, collectivités territoriales et bien entendu au niveau le plus haut, celui de l’État, on retrouve toujours ce système de cercle restreint d’oligarques ayant obtenu le privilège de décider pour l’ensemble de l’organisation.

Cet état de fait n’est pas une fatalité, il est possible d’imaginer et de mettre en application d’autres modes de gouvernance permettant d’élargir le cercle des décisionnaires habituels et surtout d’obtenir des décisions de meilleure qualité, ce qui est l’objectif principal.

Nous avons vu l’espoir suscité par le Grenelle de l’Environnement et son modèle à trois parties: la société civile (à travers les associations), les entreprises, et les personnes publiques (les collectivités territoriales et l’Etat). Ce type de modèle permet de mieux prendre en considération l’avis des différents acteurs concernés et de mieux impliquer toutes les parties  non seulement dans la prise de décision mais aussi dans la mise en œuvre des solutions retenues. Les compromis trouvés sont moins politiques ou idéologiques et tendent vers des solutions pragmatiques ménageant l’intérêt et les besoins des différentes parties.
On pourrait digresser longuement sur la mise en application du Grenelle, mais ce n’est pas le propos de cet article.

On peut également s’intéresser au Comité Consultatif  National de Bioéthique (CCNE), dont le fonctionnement et la composition (bien que restreinte), sont un modèle de démocratie. Ce comité ménage une place aux différentes confessions présentes en France, aux différents courants de pensée et également aux chercheurs dans différents domaines. Il a le pouvoir d’entendre toute personnalité susceptible d’éclairer son jugement. On peut regretter deux choses :           – Son pouvoir uniquement consultatif

– Sa composition restreinte

On pourrait multiplier à loisir les exemples d’instances décisionnaires ou consultatives qui tendent à introduire plus de démocratie dans leur fonctionnement face au constat de notre propension à concentrer les pouvoirs pour faciliter leur exercice. Le million d’associations actives, en France, qui donnent à leurs membres des pouvoirs plus ou moins étendus (afin d’en contrôler le fonctionnement et d’influencer leur action), sont autant de lieux d’expérimentation des pratiques démocratiques.

La question à laquelle j’aimerai répondre est la suivante:

Est-il possible de développer des méthodes, des moyens et des outils afin de permettre une prise de décision plus démocratique dans les organisations et ce qu’elle qu’en soit le type: économique, sociale ou politique? Et de permettre cet exercice de la prise de décision démocratique malgré la taille de ces organisations: de plusieurs milliers de personnes pour certaines entreprises ou associations jusqu’à plusieurs millions pour les organisations politiques, les collectivités territoriales et les états?

Les nouveaux outils de communication ont permis un accès plus facile à l’information, et ont ainsi amélioré incidemment la prise de décision. Le seul problème étant que, pour le moment, les processus décisionnels n’ont pas évolués. Une prise de décision centralisée a toujours tendance à nous rassurer. On préfère confier les pouvoirs à une instance restreinte quitte à créer des contre-pouvoirs dont le collège est également restreint. On redoute plus que tout l’immobilisme qui pourrait ressortir d’un partage équitable du pouvoir décisionnaire si ce dernier se retrouve bloqué ou retardé dans son action. On préfère donc une décision médiocre qui permet d’avancer à une bonne décision qui arrive trop tard. Mais encore une fois, ceci n’est pas une fatalité. On peut concevoir des processus et des outils qui offrent à la fois une grande qualité décisionnelle en alliant rapidité et sécurité.

Si nous faisons l’inventaire des outils collectifs offerts à travers Internet, on se rend compte qu’ils n’ont pas été pensés pour la prise de décision:

– les forums ne sont qu’un agrégat d’opinions rarement argumentées et au milieu desquels seul certains moteurs de recherche arrivent à trouver une information pertinente.

– Les réseaux sociaux sont fragmentés et privilégient l’instantané à la construction et à la hiérarchisation des idées et des points de vue.

– Les blogs, ne sont finalement qu’une modernisation des journaux classiques, mais ils permettent tout de même une interaction plus forte avec les lecteurs et surtout ils valorisent la construction des idées et l’argumentation de leur auteur.

Si l’on s’intéresse aux outils professionnels de collaboration ou de gestion de projets, on constate qu’ils ne sont pas pensés et conçus dans une optique de décision commune. Ils ont pour tâche principale de permettre l’agrégation d’informations et leur remontée vers le décisionnaire sous un format lui facilitant la tâche et qui finalement semble bien éloigné de la réalité.

Si l’on recherche des outils réellement collaboratifs et permettant
une co-construction riche de l’information, sa hiérarchisation, sa
confrontation pour permettre d’aboutir finalement à une prise de
décision commune sur un sujet donné, alors la liste se réduit
grandement. Pour ma part j’en connais deux:

– KMI Compendium :
il permet de créer des bases de connaissances collaboratives et de les
organiser spatialement pour une meilleure intégration cognitive, il doit
encore évoluer car il n’est pas encore adapté pour les groupes de
travail dépassant la
centaine de personnes (ce qui est déjà honorable!), sinon au prix d’un
effort considérable de maintenance. C’est un logiciel libre, il peut
donc être modifié pour s’adapter aux besoins de n’importe quelle
organisation.

Votorola Project : un logiciel libre en cours de développement
ayant pour objectif de fournir un outil de démocratie directe
fonctionnel aux grandes échelles. Il est encore en version Alpha et donc
pour le moment réservé aux développeurs, mais vous pouvez contribuer
(en anglais).

Il y a également la plate-forme « Buddypress » qui est une extension de « wordpress »
(la plate-forme de blog open-source la plus utilisée au monde) et qui
permet d’installer en quelques minutes sur son site les principales
fonctionnalités  d’un réseau social : Blogs, forums, profils, groupes,
partage d’articles, etc.… Mais encore une fois il lui manque de
véritables fonctions permettant la co-décision et la co-construction de
textes, d’idées, de débats structurés. Ces fonctions pourraient  voir le
jour sous la forme d’extensions du logiciel, puisque tout le monde (à
condition de savoir programmer) peut créer de nouvelles extensions,
c’est la magie de l’open-source ! C’est d’ailleurs ce qu’est en train de
créer Europe-Ecologie Les Verts à travers leur plate-forme
collaborative
qui est gérée sous WordPress et Buddypress, ce qui est
également le cas du site de votre serviteur.

Il existe certainement d’autres outils, et il est toujours possible de faire évoluer les outils existants, qui sont souvent des logiciels libres.

Je suis convaincu qu’il est possible et de surcroit, souhaitable de développer de nouveaux outils au service de la prise de décision démocratique. Et je suis également certain qu’une décision prise par le plus grand nombre est toujours meilleure qu’une décision prise par un nombre restreint d’individus. A la condition évidemment que l’on exige de l’ensemble des participants à une décision un socle commun de connaissances du sujet en complément de leur bagage personnel. On peut également imaginer une pondération des votes en fonction de la représentativité de chaque participant au sein de l’organisation concernée. La représentativité d’un individu au sein d’un groupe est la somme de plusieurs facteurs et caractéristiques, il peut s’agir de représentativité géographique, générationnelle, professionnelle, idéologique, philosophique. Il est évident que l’on ne réunira jamais l’ensemble d’une organisation pour prendre chacune des décisions, ce serait contre productif, et extrêmement consommateur de temps. De plus l’implication et l’efficacité des participants est fonction de leur intérêt pour les questions débattues. Même si chaque individu est libre de participer à l’ensemble des décisions, inévitablement les participants ne seront pas les mêmes en fonction des questions soumises au débat. Reste à mettre en œuvre les méthodes et les outils qui serviront au mieux ce type d’approche décisionnelle.